Y a-t-il quelque chose à ajouter ?
Je voulais écrire après que le Brexit soit devenu une réalité en Juin mais je ne l’ai pas fait avant qu’un fou dans un camion ait détruit les vies d’un grand nombre de gens en Juillet sur la Promenade des Anglais, à Nice. J’ai commencé à écrire à ce sujet mais j’en ai été détournée par la polémique autour des vêtements que les femmes sont censées porter sur les plages. Pendant l’été, je me suis divertie en écrivant des lignes spirituelles sur les bikinis et les burkinis, allant même jusqu’à imaginer une législation contre les femmes portant un grenouillini (combinaison d’homme-grenouille et palmes) sur la plage. A nouveau, je n’ai pas fini, détournée cette fois-ci par la débacle Clinton / Trump.Conclusion : comme le monde bouge beaucoup plus vite que mes doigts, je ferais peut-être mieux d’abandonner l’idée d’être en phase avec lui. Si j’écris sur les mouvements de l’âme, il subsiste au moins une vague possibilité que les mots jetés sur une page survivent à une main pressée. Je n’aimerais pourtant pas faire confiance à un sondage là-dessus.Nous voici donc, en dépit des sondages, au pays du Brexit et de Trump avec Le Pen en embuscade. Mon esprit voudrait fuir ce que mon âme sait qu’il ne peut pas. Mon cœur bêle son impuissance alors que les forces de la vengeance ne cessent de croître. Je souhaite pourtant continuer à jouir du privilège de mon existence de classe moyenne blanche, éduquée, free-lance quoique surtaxée, propriétaire bien nourrie et en bonne santé. Oui, j’ai des moments de rage aveugle à cause du traitement barbare des femmes dans de vastes parties de la planète. J’ai aussi des moments de profonde gratitude envers la sororité historique dont le courage a assuré ma propre liberté politique, psychologique et financière. Et, c’est vrai, j’ai considéré tout ça comme allant de soi. La Liberté n’est pas mon droit, c’est mon privilège ! Comme je dois être enviée et haïe pour mon autosatisfaction et ma supériorité inavouée. Peut-être pas moi specifiquement (c’est réconfortant) mais ce que je représente. En dépit de mon sexe, j’appartiens pleinement à cette minorité qui, avec arrogance, a étalé son pouvoir chargé de testostérone à travers le monde depuis des décennies (hum… depuis toujours, devrais-je dire). Cette minorité privilégiée subit des attaques de l’extérieur et se ratatine lentement de l’intérieur. Boris a joué le pouvoir au poker avec David quand il a gaiement menti à la Grande-Bretagne sur les bénéfices d’une sortie de l’Union Européenne. Il est maintenant Ministre des Affaires Etrangères de ce pays et David a siffloté joyeusement en quittant Downing Street. Donald vient juste de démontrer que l’argent c’est le pouvoir et qu’on peut dire n’importe quoi et gagner une élection. Vladimir, après avoir montré qu’il pouvait pisser loin, a retrouvé sa place à table avec les grands (et grandes) après avoir été ostracisé et humilié par l’administration précédente et ses copains Européens.HUBRIS ! Et, pour l’arrogance face aux dieux, Nemesis a des chances d’avoir le dernier mot.Par ailleurs, ne l’oublions pas, les coquelicots que, ces deux dernières semaines, on a vu arborer les présentateurs de journaux télévisés Américains et Britanniques sur leur revers de veste ou leur robe sont un appel à se souvenir, pas seulement de ces millions de gens dont le sang s’est répandu parmi les coquelicots et leur rougeur sur les champs de bataille de l’Europe pendant la Première Guerre Mondiale, mais aussi que, quand Hubris règne, Nemesis punit. Et ELLE n’épargne personne !Tout ceci étant dit, je dois encore préciser que je suis heureuse d’appartenir à ce club, malgré le fait que j’ai honte du comportement sans vergogne de ses élites dirigeantes. Je suis consciente de vouloir sauvegarder tous mes privilèges sans subir aucun des inconvénients liés à mon appartenance. Peut-être que ça signifie que j’aide et soutiens Hubris. J’ai considéré la démocratie comme un fait acquis et je me trouve maintenant désenchantée par elle. Pourtant elle est si précieuse. Je ne peux imaginer quoi que ce soit pour la remplacer. En ce moment, je me sens triste d’être ici à regarder en attendant de voir quelle sera la prochaine étape.Pendant ce temps, samedi soir, ici à Paris, des gens sont retournés au Bataclan pour la première fois depuis que des centaines de personnes ont été massacrées sans pitié sur sa piste de danse et dans des cafés des environs, il y a juste un an. Ils y sont allés pour se souvenir. Ils y sont allés par défi. Ils y sont allés juste pour être ensemble. Et Sting a ouvert le concert avec « How fragile we are… »*Mes amitiés à toutes et tousLynne * « Comme nous sommes fragiles… »